Bruno Berthomé Architecte et Dirigeant

Bruno Berthomé, architecte et dirigeant de l’Agence Paume intervient depuis 30 ans sur la conception des ZAC et leurs espaces publics. L’Agence a notamment été distinguée par le Grand Prix Ville Durable pour la ZAC de La Fleuriaye à Carquefou et par le prix d’Architecture et d’Aménagement CAUE pour la ZAC de la Minais à Sainte-Luce-sur-Loire !

Le 3 mars 2022, Bruno Berthomé, nous faisait découvrir ces deux projets exemplaires lors de l’expédition apprenante du Club Habitat et Qualité de Vie Pays de la Loire. Lors de cette visite pleine d’interactions, Bruno nous a conté l’histoire de ces ZAC et nous a livré ses enseignements suite à l’élaboration de ces 2 projet. Habitat et Qualité de Vie lui a posé quelques questions ! 👇

Quels enseignements avez-vous tiré de l’élaboration de ces 2 ZAC ?

« Tout d’abord, je dirais : faire de la ville tout en conciliant paysage et urbanisme !  Nous ne sommes pas sur une idée d’urbanisme qui fait table rase, mais plutôt sur un urbanisme qui sait respecter le milieu dans lequel il s’insère. C’est quelque chose de très important, surtout sur ce type de ZAC qui prends énormément de place en termes de surface, soit environ 100 hectares sur la ZAC de la Fleuriaye et environ 50 hectares sur la Minais. Nous sommes bien dans cet optique de tirer parti du site : nombreux sont les urbanistes qui le font déjà, mais je pense que c’est d’ailleurs le but ultime lorsqu’on est sur de tels lieux ! C’est ce qui fait l’intérêt de la chose : c’est à la fois de mettre en valeur et de s’appuyer sur un paysage déjà constitué, et à la fois de le qualifier et de l’étendre par sa surface, en travaillant sur les espaces publics pour que l’urbanisation puisse en prendre toute la substance et que le minéral ne soit pas trop prégnant !

C’est ce qui fait la différence avec une urbanisation trop dense, où la densité est tellement forte qu’elle ne permet pas de percevoir l’histoire du site. On en vient même à oublier pourquoi l’urbanisation est venue s’installer sur ce lieu à l’origine. Il est nécessaire de respecter le milieu dans lequel nous nous installons en préservant au mieux la nature présente et cette biodiversité qui la fait vivre, avec si possible l’ambition de la développer. L’aménagement des bassins de rétention constitue par exemple un élément fort du paysage. Trop longtemps considérés comme de simples éléments techniques, ces bassins deviennent peu à peu presque des éléments naturels du lieu grâce à un modelé plus fin de leur profil et un paysagement en lien avec leur environnement proche. Il y a donc une réelle importance à développer la qualité paysagère qui est déjà présente sur le lieu ! »

Quels sont les facteurs de l’acceptation sociale de la densité ?

« Comme je l’ai expliqué avant, je pense que c’est le fait que le paysage soit aussi présent. On accepte cette densité quand elle est au contact d’espaces paysagers très qualitatifs et qui laissent respirer l’urbanisation. C’est le rapport entre les pleins et les vides, entre le minéral et le végétal… Il faut laisser place à la liberté naturelle du lieu ! Et c’est ce qui fait la singularité de ces 2 ZAC.

Avez-vous constaté des évolutions ?

Oui, car je pense que tous les habitants de ces deux quartiers apprécient cette ambiance ou ce milieu paysager dans lequel l’homme s’immisce. Ce qui fait la force de ces quartiers, ce sont les espaces libres, tous ces espacements et ces reculs entre éléments très denses, et c’est très appréciable. On a vraiment l’impression d’être dans la nature ! Surtout pour les habitants de collectif, qui ont des percées visuelles lointaines et dégagées vers la nature.

Quels sont les facteurs de la qualité de vie des familles ?

Il y a un espace de vie très appréciable, et tout ce qui est lié au logement c’est-à-dire le fait d’avoir soigné orientations et reculs des logements permettant de concilier vie de famille et lieux de vie extérieurs agréables et appropriables. Cela doit permettre de minimiser ce sentiment d’oppression lié à une certaine promiscuité.

Il y a également toutes les questions de mobilités et les services qui sont à proximité. Offrir une alternative à l’utilisation systématique des voitures pour se déplacer devient un enjeu essentiel dans tout nouvel aménagement : ainsi, les voies dédiées aux modes actifs, vélo et deux roues, accompagnent voire se substituent aux chaussées automobiles traditionnelles au contact direct des logements ou au pire les voies de dessertes deviennent des espaces partagés où les piétons et cyclistes en sont les principaux usagers et les voitures des invités discrets et respectueux.

Aimeriez-vous habiter dans ces quartiers ?

Un facteur important dans l’élaboration d’un quartier urbain, c’est de se projeter ! Pour le créateur, la projection est primordiale, c’est la meilleure réponse qu’il puisse donner ! Je ne fabrique pas quelque chose dans lequel je ne daignerais pas me projeter et y habiter.

Pour moi, la ZAC de la Fleuriaye est très facile à percevoir comme un lieu de vie idéal. Le paysage environnant donne l’impression d’être dans un lieu singulier, qui va presque à l’encontre de l’urbanisation actuelle, et je trouve ça très appréciable. On ne cherche pourtant plus à s’étendre mais à construire sur la ville, ou à reconstruire la ville autrement.  Il faut travailler sur du renouvellement urbain, et on peut refaire du paysage urbain dans ce cadre-là ! On vient s’intégrer dans ce qui est déjà présent, mais on peut enrichir le paysage au cœur du minéral pour regagner une ambiance moins lourde et dense. Comme je le disais, il faut accéder au juste équilibre entre les pleins et les vides ! »